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Archipel : La nécessité d’une île

C’est sur une île italienne, l’Isola Comacina, qu’a pris forme dans l’atelier du designer Sébastien Cordoléani, le premier sac qui donnerait naissance trois ans plus tard à sa marque, Archipel. Objet du désir.

En résidence sur cet ilot posé sur le lac de Côme, il expérimente alors la création d’objets réalisés en pliant des feuilles de cuir recyclé. La visite de son frère et sa recherche d’un sac de voyage simple, qu’il pourrait fabriquer intégralement avec les matériaux à sa disposition, le conduisent à pousser plus loin son processus, pour créer un sac sans aucunes coutures, dont le pliage sera maintenu en forme uniquement par son anse.

Ce processus, qui fait la part belle à une matière unique exploitée pleinement sans autres artifices, ainsi qu’à l’épure de la forme, qui se dédie entièrement à sa fonction, on le retrouve tout au long des projets élaborés par ce prolifique designer industriel formé à l’ENSCI et lauréat de multiples prix, dont le Grand Prix du Jury de Design Parade, décerné par la Villa Noailles en 2007.

Qu’il travaille le papier technique pour créer ses objets et suspensions Pattern ou sa lampe Alcôve, le métal pour le Marchepied L, édité par Tolix, ou déjà le cuir pour sa chaise Strates, les matériaux naturels sont traités en une seule pièce, façonnée et structurée, combinant pureté et ingéniosité du dessin et savoir-faire de l’artisan.

Pour créer sa ligne de sacs Archipel, Sébastien Cordoleani ne se fait pas maroquinier, mais prolonge sa réflexion de designer autour de cet objet incontournable de nos garde-robes, pour revenir à l’essentiel Il choisit des cuirs mats, ingrassato, teintés à cœur et tannés naturellement grâce à des végétaux. Leur texture consistante mais souple sous la main, est exploitée de façon parfaite dans un subtil jeu de découpe unique à l’emporte pièce et de pliage, retenu par une bandoulière et fermé par deux petits rivets en laiton façonnés à la main par un artisan parisien. Aucune couture, aucun détail inutile, chaque élément présent sur le sac fait corps avec l’objet et sert sa fonction première de contenant. La forme est simple et intemporelle, le cuir, à la beauté brute et galbée se patine avec le temps.

Le modèle originel est désormais décliné en trois tailles, petit, moyen et grand et a aussi donné naissance à une besace, une pochette et un sublime sac à dos, conçu sur le même postulat. Des matériaux nobles, une forme épurée, une fabrication locale, une vision moderne et personnelle de l’accessoire, promise à un bel avenir.

Objet du désir : Lampadaire Moon

Avec ses lignes tendues, ses matières brutes et son câblage apparent, le lampadaire Moon diffuse une esthétique industrielle, doucement tempérée par le traitement de ses finitions, la légèreté de ses articulations et des éléments composant les abats jour et les contrepoids. Ses lampes satellites, fines feuilles de laiton perforé doré en bain ou de laiton cuivré verni mat plié, se posent délicatement sur l’acier huilé au toucher soyeux de ses axes.

Le Ferronnier d’Art Bruce Cecere et le Designer Samuel Accoceberry ont travaillé de concert, apportant à cet objet collaboratif des éléments uniques issus de leurs univers respectifs. S’éloignant d’une approche trop conceptuelle, ils ont tous deux réalisé un objet usuel élégant, alliant parfaitement le travail de forge et de ferronnerie d’Art maitrisés par l’artisan, au style rythmé et graphique du designer, qui jouent ici ensemble avec la plasticité du métal.

Cette collaboration riche est née dans le cadre de Peri’Fabrique, programme de co-création organisé dans le cadre des DDays, avec le soutien de la Fondation Bettencourt-Schueller et d’Est Ensemble Grand Paris. Le choix du designer incombe ici à l’artisan et non l’inverse, provoquant un dialogue nourri et des échanges propices à l’innovation.

Pour cette création, le duo a reçu une bourse d’accompagnement en 2016, ce qui leur vaut aujourd’hui d’être exposés sur le stand de Peri’Fabrique à la Biennale Révélations. Le lampadaire Moon est par ailleurs désormais édité par SAS Edition.

Dans les carnets du designer Antoine Boudin

Couchés à l’encre et au crayon de couleur dans des cahiers, invariablement de la marque Moleskine, les croquis d’Antoine Boudin racontent l’histoire de sa recherche. Il a bien voulu partager avec nous ses dessins détaillés et précis, qui présentent une première intention toujours très aboutie.

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Suspension – Dessin Antoine Boudin
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Chaise en canne de Provence – Dessin Antoine Boudin
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Chaise – Dessin Antoine Boudin
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Fauteuil – Dessin Antoine Boudin

 

 

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Antoine Boudin, designer/trimardeur: créer son propre langage

C’est sur les hauteurs de Hyères, au cœur du Parc Saint Bernard, dans l’ancienne maison de jardinier de Charles et Marie-Laure de Noailles, que nous rencontrons Antoine Boudin. Un lieu de travail qui sied parfaitement au designer, lauréat en 2009 du grand prix du jury décerné par la Villa Noailles pour son festival Design Parade. Un cadre parfait, abrité par une épaisse végétation qui surplombe la ville et offre une vue à couper le souffle sur les marais salants et la plage de l’Almanarre.

ab11Une forme de retour aux sources, pour ce provençal, qui après des études à Paris et un diplôme de Designer Industriel de l’Ecole Cantonale d’Art de Lausanne, a poursuivi une carrière auprès d’Alexander Taylor à Londres et de François Azambourg, à Paris. Antoine Boudin a ressenti la nécessité d’élaborer son propre vocabulaire, de créer son langage personnel, un peu comme ces trimardeurs, auxquels il s’identifie volontiers, qui communiquaient dans une langue connue d’eux seuls. Ses créations égrènent des noms provençaux : Envela, Lunado, Eliou

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La Provence est le territoire familier dans lequel Antoine Boudin ancre son travail. Il en explore pas à pas les matériaux et savoir faire artisanaux pour créer sa propre cartographie. Elle passe par une exploration scrupuleuse de la nature et des matières premières qu’elle peut lui fournir.

La canne de Provence tout d’abord. Cette graminée géante qui rythme les paysages marécageux et est utilisée dans le Var pour fabriquer les anches des instruments à vent. Elle lui inspire des luminaires délicats et aériens. C’est Eliou, une suspension conçue comme un mobile, sorte de flambeau flottant épuré à l’extrême, exposée au Palais de Tokyo. Une série réalisée pour Petit h, les objets ludiques Pitchoun h et la lampe de table Galo en canne et cuir.

Le bois d’agave, présent dans les jardins bordant son atelier lui donne l’idée d’une chaise, adoptant la courbure naturelle du bois, Envela ainsi que d’une lampe, Lunado.

ab6Des boules de pétanque cloutées traditionnelles en Provence, il s’inspire pour créer le plateau de la table Petanco.

Reste le liège, qu’il a exploré brièvement pour créer une scénographie sur Design Parade il y a quelques années.

Antoine lance comme une boutade qu’il ne passera à autre chose que lorsqu’il aura épuisé le potentiel de sa région. Il nous montre une planche de terre encore fraiche, façonnée dans un atelier de Salernes avec lequel il compte travailler sur un projet d’hôtel à l’Ayguade.

ab8Pour lui, se lancer à la rencontre de ces matériaux et des artisans qui les façonnent semble faciliter le processus créatif. Il aime se heurter aux contraintes techniques qui l’obligent à penser autrement et parle même de la « magie du cahier des charges ». On sent bien qu’il aime sortir de sa zone de confort pour libérer le processus, en toute humilité.

Sa passion pour la voile et la glisse, pour des objets flirtant avec l’architecture, qui sont éprouvés par les éléments, se retrouve dans cette exigence. Il nous dévoile la réalisation dont il nous dit être le plus fier. Quieu Bagna II, Un dinghy qui utilise pleinement le potentiel technique de la canne qui compose sa coque. Elle assure une flottabilité exceptionnelle au navire pour un poids extrêmement réduit. Une victoire de la mauvaise herbe, sur les matériaux composites modernes.

L’utilisateur final reste en permanence sa préoccupation principale. Une éthique de travail qu’il souhaite transmettre aux étudiants qu’il forme à l’École Supérieure d’Art de Toulon Provence Méditerranée. Les rendre autonomes, faire émerger des passions et pousser ses étudiants à créer leur propre langage, sont ce qui le motive.

Entrainer d’autres « trimardeurs », sur le chemin de vie, parfois tortueux qu’est celui de la création. Aller à la rencontre des autres et continuer ce voyage initiatique, en Provence ou ailleurs. Heureux qui comme Ulysse….

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